mardi 19 mai 2009

L'autre cote de la medaille

Quand le Burkina va-t-il enfin decoller? La reponse est aussi simple que ca: quand il commencera a voir l'autre cote de la medaille du developpement. Qu'est ce que cela signifie?
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Ce n'est surement pas la premiere fois que tu auras entendu des Burkinabe, des cooperants Blancs, parlant du developpement en Afrique, faire des reflections du genre "c'est dans la tete", ou "c'est une question de mentalite", 'c'est une question de culture"... Depuis que je suis enfant, j'en ai entendu des commentaires comme ceux-la. Moi, toi et bien d'autres personnes, gouvernants et gouvernes, sommes arrives un jour ou l'autre a la meme conclusion. Mais qu'en avons-nous fait? Pas grande chose. Bien au contraire, il semble que le fait d'etre arrive a la meme conclusion que ceux qui nous ont precedes, brillants ou pas, nous a tout simplement donne le sentiment que nous "voyons clair", que nous etions sortis de la "matrice". La question se pose. En sommes nous vraiment arrives a cette conclusion, apres avoir fait de longues etudes, juste pour la satisfaction que ca procurre de le savoir? J'ose esperer que non sinon, la seule chose que nous aurions prouve a nous-memes et aux autres, c'est que nous ne sommes pas aussi sages ou intelligents que ca. Il aurait tout simplement ete plus sage de racourcir le chemin de l'apprentissage en profitant de l'experience de ceux qui nous ont precedes: reconnaitre des le depart que le probleme, c'est dans la tete.
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C'est une entreprise a encourager que l'investissement dans les infrastructures, dans les projets de developpement, dans la micro-finance... Remarque cependant bien la nuance, ces investissement visent a promouvoir le developpement ou si tu veux a reduire les barrieres physiques ou tangibles au developpement. Mais ces barrieres ne sont juste que la partie visible du iceberg. Nous devons aussi travailler activement a reduire et a detruire les barrieres psychologiques, culturelles ou intangibles au developpement: la partie immergee du iceberg. C'est barrieres, c'est ce que nous regroupons dans "le probleme, c'est dans tete". Quel genre de medecin diagnostique-t-il une diarrhee mais administre au patient un remede contre la meningite sous pretexte que le systeme nerveux est precieux ou plus important que l'estomac? L'Afrique et encore moins le Burkina ne se developpera pas tant que ces barrieres au developpement ne sont pas debarassees. Elles constituent l'ancre qui retiennent le bateau de prendre le large.
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Pour illustrer mon point de vue, je voudrais raconter une breve histoire. Un brillant entrepreneur Burkinabe, fondateur d'une societe de gardiennage, racontait un jour a la tele qu'il a offert un travail a temps partiel comme agent de securite devant les banques de Ouaga a des etudiants mais qu'ils ont refuse, citant la reaction de leur connaissance (copines, camarades de classes,...) comme raison. Je ne veux pas rentrer dans les details des retours sur investement en terme de nombre d'annees d'etudes, ou des statuts et autres,.... Cependant, il me semble que la sagesse selon laquelle il n'y a pas de sot metier semble avoir disparu. Ces sont des attitudes comme celle-la et bien d'autres, qui nous retiennent cloues au sol. Ou irons-nous quand nous discriminons le travail meme quand nous n'en avons pas, en esperons peu et dependons de nos parents ou grands freres, cousins, oncles... pour vivre? Les pays qui se sont developpes ont place la valeur, la dignite d'un homme plus dans son caractere, dans sa capacite a pourvoir pour lui-meme et pour sa famille independamment de sa profession, ... Et c'est ce que nous devons copier de chez pays-la. Les valeurs, pas necessairement leur style de vie ou de gestion.
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En terminant, je voudrais parier sur la capacite et la determination de notre generation a refuser a emprunter le chemin facile de simplement repeter aux jeunes generations que nous avons decouvert le probleme du Burkina ou de l'Afrique. Les efforts necessaires pour s'attaquer efficacement aux barrieres intangibles au developpement sont paradoxallement moins couteux que ceux necessaires pour s'attaquer aux barrieres tangibles. Par exemple, ca couterait peut-etre, de la part d'un aine, de s'asseoir pendant une trentaine de minutes autour des pots de the avec les plus jeunes pour exercer son devoir de mentor. Nous sommes aussi produits de cette societe et ne devons pas perdre de vue que nous avons aussi besoin de mentors pour nous aider a affronter les defis dont nous n'avons pas encore conscience.
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Je suis sur que chaque lecteur de ce bulletin a son idee de comment nous pouvons travailler a debarasser une a une les differentes barrieres qui minent le developpement de notre chere patrie. Faites-en des propositions. Merci.

6 commentaires:

  1. Ton article est pertinent du point de vue de la problématique (briser des barrières culturelles au développement), mais ne propose pas de solutions, en tout cas pas véritable solution, pour ma part. L'héritage culturel peut être un atout, tout comme un handicap. Handicapant quand on s'y craponne du genre "on est né trouvé", et un atout quand on s'y appuie pour proposer des alternatives aux méfaits des "technologies extérieures".

    Plus clairement, je pense que la science est un bien de l'humanité, et non celui d'une culture ou d'une race, fut elle prétendument considérée "supérieure, civilisatrice", mais là n'est pas le débat. Nos décollerons quand nous ferons des découvertes et des exploits de la science un patrimoine national, universel, sans poser de barrières psychologiques de rejet "de la chose de l'extérieur" ou pour le dire crument, de la "chose du blanc".

    Je ne suis tout de même d'accord de nous appuyer sur des valeurs sures de la confiance (la crise actuelle en atteste), du monitoring des ainés...Mais, quand à l'idée qu'il n'y a pas de sous metier, je crains de ne pas cautionner cette thèse, car il ya bien un sous métier pour chaque catégorie de capital humain donné. Un docteur, qui a passé presque toute sa vie à rechercher, comprendre, et qui au final devient gardien de nuit, je trouve cela déplorable et une perte pour la nation. C'est un investissement (en argent, en temps, sans oublier que dans les bancs de l'école il a pris la place d'autres personnes qui auraient voulu poursuivre leurs études...) non rentable.

    Il n'ya pas de sous métier "intrinsèque", puisque tous concourrent au bien collectif. Mais encourageons les médecins à soigner, et les mécaniciens à réparer nos engins! Chacun à sa place, et tout le monde y gagne.

    La question principale demeure: comment "changer les mentalités" pour les conformer à la rationalité, à la science (entendu comme patrimoine de l'humanité, et non comme le produit d'une quelconque culture extérieure)?

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  2. Je voudrais saluer cette belle initiative de mener une réflexion sur le décollage de notre chère patrie le Burkina Faso. De prime abord, je partage l' opinion selon laquelle nous devons aller au-delà de l'écran de fumée en ne se contentant pas des propos du genre "c'est une question de mentalités ou ça se trouve dans la tête" Toutefois, il me semble que ces propos sont bien fondés et je juge opportun pour nous de refléchir aus conditions pour sortir de cette auberge (comme l'a mentionné Ilboudo Laurent). Je n'ai pas la prétention d'y apporter des solutions miraculeuses mais je pense que nous devons mettre l'accent sur l'alphabétisation ou sur l'éducation de manière générale. En effet, tant que le citoyen lamba sera prêt à donner sa voix aux élections à un candidat de qui il a bénéficié d'un sac de riz ou de mil, tant que nos commerçants thésauriseront leur argent sous le lit,[...], nous ne pourrons pa véritablement envisager le développement. Il faut que chaque burkinabè arrive un jour à être non seulement conscient, mais aussi responsable des actes qu'il pose. C'est à ce prix, que nous pourrons mener des actions concertées visant d'amour l'intérêt commun qu'est celui de la Nation car "main invisible" d'Adams Smith a malheureusement montré ses limites dans nos pays. Pour finir, j'aimerais rappeler que nous sommes dans un système où ce sont les rapports de force qui gouvernent et convenez avec moi que ce sont les vainqueurs qui écrivent l'histoire. Si le G9 aujourd'hui s'est métamorphosé en G20 pour inclure des pays comme la Chine, c'est bien parce qu'il n'ya que ces pays qui ont des excédents permettant de financer le plan obamien de relève. Arrêtons donc de croire que les aides bilatérales ou multilatérales sont faites pour nous aider et gardons à l'esprit que les Etats n'ont que des intérêts. Puissions nous briser cette étape sombre de notre histoire pour ouvrir à notre très chère patrie des lendemains meilleurs.

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  3. Avant de tout, je voudrais apporter un eclaircissement a l'allusion que j'ai faite en citant le proverbe "il n'y a pas de sot metier". Je ne le cite pas pour nier la necessite economique de la specialisation. Non, pas du tout. Chacun doit faire son boulot et bien sur, faire ce qu'il sait faire de mieux. Par contre, je faisais allusion a la lecon morale que renferme ce proverbe, a savoir celle que la valeur d'un homme n'est pas dans son metier mais dans son caractere. En d'autres terme, notre metier ne definit pas qui nous sommes. Il peut definir notre statut social ou autre chose mais pas qui nous sommes. Et ce ne sont pas les statuts qui developpent une nation, mais les hommes de caractere. Les prejuges que nous avons a l'egard des differents boulots nous previennent parfois de saisir la necessite qu'exige la triste realite.
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    Ceci etant dit,le debat que je suscite autour du combat contre les barrieres psychologiques ou culturelles au developpement pourrait sembler impertinent si nous nous hatons de conclure que la solution est dans l'education uniquement. Car voyez-vous, c'est exactement ce que nos dirigeants et les bailleurs de fond ne cesse de precher. Bien sur que l'education ne saurait etre soustraite de l'equation; et bien sur que si tout le monde avait au minimum une licence au Burkina nous serions en train d'experimenter une situation differente, et donc je serais en train de susciter un debat d'un ordre different. Mais la ne pas le cas. Cependant, nous ne pouvons nous contenter encore pointer a l'education comme la solution et croiser les bras.

    Pour donner plus d'eclaircissement sur mon idee de mentorat, voici des activites que je proposais un ou deux mois avant a l'alumni des etudiants burkinabe ayant etudie au Maroc. J'avais alors susciter egalement dans ce forum, un debat sur la motivation de la jeunesse au Burkina. Je les reprends ici parce que les deux themes sont plus ou moins intresequement lies sinon les memes.
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    - Tisser des relations avec des ecoles primaires ou un ou une membre du groupe pourrait aller parler de son travail aux eleves d'une classe donnee pour 30 minutes au max. Les enfants pourront etre interesses par une telle carriere, souhaiteraient alors savoir quelle genre d'etudes ont fait pour avoir une telle carriere,....
    - La meme chose peut etre faite au college et au lycee. Mais j'argumenterais que l'accent soit mise plus sur les jobs du futur. Par exemple, il serait interessant qu'un ingenieur en Informatique puisse expliquer aux eleves de series scientifiques que l'Informatique n'est pas que reparer et monter des ordinateurs. Il y a tellement de chose a faire que le fait de le savoir peut inspirer, donner naissance et/ou attiser la motivation, l'ambition ou le desir de s'orienter en Informatique.
    - Au niveau universitaire, j'ai pas une initiative precise mais je crois que c'est la ou certains de nous enseignent et pourraient donc utiliser leur cours pour energetiser, donner l'espoir, cultiver l'ambition,l'esprit du dur labeur...
    - Enfin, une initiative qui me tient a coeur, c'est celle de monter un programme televise (Heros) ou nous pourrons presenter a la nation des hommes ordinaires affrontant les memes defis que tout le monde et parfois pire que les autres mais qui arrivent malgre tout a garder la tete haute. Les interviews avec ces gens relateront des histoires touchantes, des moments d'introspection et de questionnement, des passages qui d'une maniere ou d'une autre seront un appel soit au patriotisme, soit a l'espoir, au courage, a la combativite, au "hardworking",... et celles-la sont les vertues nous voulons cultiver en nous-memes et en nos jeunes freres.

    Laurent, en terminant a soulever une question tres interessante, celle qui a mon avis semble sousentendre une confrontation, opposition entre cultures et sciences. Il serait interessant qu'il argumente et ainsi, susciter un debat autour de la question aussi.

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  4. Tres ravi de parcourir ce message refletant une des tristes realites du pays, plus precisement le probleme de discrimination des jobs. Bien que dramatique, cela me fait souvent rire de savoir que des gens qui n'ont aucune base solide pour s'autonomiser financierement aillent jusqu'a avoir le zele de refuser un emploi sous pretexte qu'on veut garder son honneur ou son integrite aux yeux de soit-disant copines ou connaissances, ou encore de son niveau d'education pour se retrouver en train de faire un "job" que meme un animal refuserait au nom de l'honneur et de la dignite: le vol, la prostitution et tout le reste. Justement que l'on a cultive en la jeunesse le gout de la vie facile, une vie qui ressemble beaucoup plus a une rose sans epine. Traiter de ce sujet, Serge, renvoie encore a ton theme sur l'education. il nous faut une education de qualite, je dirais une education beaucoup plus basee sur la valorisation des conduites morales qui elevent la dignite humaine. Et pour ce faire,je trouve que l'introduction d'ecoles d'arts aux pays serait la bienvenue. Et par ecole d'arts, je vais au-dela de ce que tout le monde sait deja pour parler de ces ecoles qui produisent et fructifient la grammaire de la vie, les vrais arts de vivre qui conduisent a une societe beaucoup plus harmonieuse que ce que nous voyons aujourd'hui. Si l'on fait comprendre aux jeunes que la vie consiste a manger, boire et crier haut et fort sans savoir que le plaisir que procure un travail de haut niveau (apres avoir precedemment acepte' et battaile' dur avec un qui fut de tres bas niveau) est un des plus grands,sinon le plus grand de tous les plaisirs possibles,il sera toujours difficile de faire justement voire a une telle population cette autre face de la medaille si vitale au developpement de tout pays en general,et du Faso en particulier.

    Merci, Serge!!

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  5. Desanonymat: PARE J.

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  6. je suis peut être en retard dans le débat mais j'avais écrit mon commentaire depuis un bon moment. je l'envoi quand même.

    Je crois que s’agissant de la question de sous métier, il faudrait voir sous un angle de court terme et non comme un emploi durable. En effet, en France ou aux USA, on voit bien des gens qui font le vrai MBA mais cela ne les empêche pas de plonger les soirs ou de faire un petit boulot pour joindre les deux bouts. On voit aussi des gens qui sont des agents de bureau les journées, et les soirs, ils sont des serveurs dans des restaurants, etc. les médecins ou autres peuvent faire n’importe quel boulot en attendant de mettre autrement leurs connaissances au profit de la société. Alors pourquoi ailleurs les étudiants peuvent faire ces petits boulots et au Faso, nos étudiants refusent !!!!!!!


    Sur la question du développement du Burkina, voici ma contribution :
    A mon sens, nos dirigeants doivent avoir une claire volonté politique de lutter contre la corruption, l’impunité et faire des choix pertinents dans les projets de développement qui seront gérés par des gens intègres. Lors du forum sur l’efficacité de l’aide publique au développement (APD), il est ressorti que si d’une part, les investissements réalisés grâce à ces fonds, étaient orientés vers des secteurs productifs et que d’autre part, sir l’intégralité des fonds avait été injecté dans les projets visés, eh bien, les pays bénéficiaires auraient atteint un niveau de développement nettement plus appréciable qu’il ne l’est actuellement.
    Nos dirigeants doivent servir d’exemples et être de véritables leaders. C’est seulement dans ces conditions que les jeunes et le peuple en général, pourront être fiers de leur pays, et seront convaincus pour travailler dans l’intégrité, dans la solidarité et dans l’amour de la patrie car ce sont ces trois grandes valeurs culturelles qui faisait la Haute Volta et qui peuvent hisser un pays vers un développement économique et y social. Amis déjà, nous les jeunes, chacun à son niveau peut servir et doit servir d’exemple.

    Dans son discours d’ouverture du forum Burkinabè sur l’alternance, Zephirin Dabré a dit : « l’Etat, notre bien commun à tous, est devenu un instrument d’enrichissement aux mains de gens promus uniquement sur la base de relations de concussions, et dont l’énergie se dépense plus dans les surfacturations de marchés, que dans la conduite laborieuse de nos chantiers de développement »

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